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Choux romanesco, Vache qui rit et intégrales curvilignes
26 juillet 2008

Bienvenue dans la 1.26eme dimension !

Mario
1991 - Super Mario Island / 1996 - Super Mario 64

Quelle est la principale évolution entre ces deux épisodes de la série de jeux vidéo Super Mario ?... Le passage à la 3D !... D, comme dimension !

Mais qu'est ce qu'une dimension ?

Un point, ça n'a pas de dimension.
Une droite, ça n'a qu'une dimension.
Un plan, ça a deux dimensions.
L'espace possède 3 dimensions.
(Et je passe l'espace-temps pour les 4 dimensions, ou les 26 dimensions de la théorie des cordes)

 

Mais c'est quoi, une dimension ?

Pour résumer le plus simplement possible, le nombre de dimension de ces objets représente le nombre de paramètres dont on a besoin pour s'y repérer de manière satisfaisante.

bete_cerclePrenons par exemple un bête cercle, comme celui juste à gauche. L'intérieur du cercle, c'est quelque chose à 2 dimensions, son périmètre, lui, est une courbe, donc une seule dimension.

Si on veut parler du point B sur ce cercle, on peut procéder de plusieurs manière :
(1) * On peut dire que le point B est le seul point du cercle dont l'angle AOB mesure 142,16°
(2) * On peut dire que le point B est le seul point du cercle telle que la longueur de l'arc de cercle AB mesure 2.48.

Dans ces deux cas, un seul nombre suffit à identifier le point, ou pour n'importe quel point du cercle. Voilà pourquoi on parle ici de dimension 1.

 

courbe_main_leveePar contre, si on veut parler d'un point de l'intérieur du cercle, on ne pourra pas le faire avec une seule coordonnée. Grâce aux axes, on a un système simple pour repérer un point dans ce cercle : ses coordonnées. B, par exemple, a pour coordonnées (-0.79, 0.61) (2 coordonnées). Il faut toujours au moins deux nombre : l'intérieur du cercle possède donc 2 dimensions !

 

Quand on parle de courbes, c'est généralement celles tracées en un coup de crayon (comme celle représentée à droite). Pour situer un point B sur la courbe, la façon la plus simple est de fixer un point A sur cette courbe, et de mesurer la distance entre A et B (comme dans le cas (2) de l'exemple du cercle). Cette distance forme un système de coordonées à 1 paramètre, ces courbes sont donc de dimension 1.

 

Et alors ?

 

Koch_a_points

Et la courbe de Koch ?! On choisit en premier lieu le point A le plus à gauche possible. Pour situer un point quelconque (comme le point B), le mieux serait de faire comme pour les '"courbes dessinée à main levée", et mesurer la distance entre A et B. Seul problème : la courbe de Koch est fractale, et la distance entre A et B est infinie !
La dimension de cette courbe n'a pas l'air d'être 1 !

En fait, mesurer la dimension d'un objet, c'est trouver la taille du plus petit système de coordonnées que l'on peut poser sur l'objet. Et c'est loin d'être très aisée dans le cas de monstres  (pourtant pas si horrible que ça) comme le flocon de Koch !

En fait, il faut trouver autre chose de plus ingénieux pour définir la dimension, et pour ça, il faut penser à la manière même de mesurer les objets, notamment, celle de la côte bretonne.

 

Dimension fractale
(1) - Imaginez que vous vouliez mesurer une droite (dimension 1) longue de 10 mètres à l'aide d'une règle de 1 mètre. Pour ça, il va falloir votre règle 10 fois. Si votre règle est scolaire et ne mesure que 20cm, il va falloir la reporter 50 fois.
Ici (en dimension 1), quand je divise par 5 la taille de mon étalon, je dois multiplier par 5 le nombre de fois où je vais devoir le reporter.

 

(2) - Imaginons-nous maintenant carreleur, notre travail est de couvrir une surface de 5m² à l'aide de carreaux de 1m×1m. Il en faudra 25.
Si les carreaux ne sont pas de 1m×1m mais de 20cm×20cm on aura besoin de bien plus de carreaux pour tout recouvrir : il en faudra 625.
Ici, (en dimension 2), quand je divise par 5 la taille de mon étalon, je dois multiplier par 25 le nombre de fois où je vais devoir le reporter.

{La taille du carreau est en fait divisée par 25, mais ce que j'appelle "taille de l'étalon" est divisée par 5 - Faute de meilleur terme que "zoom" pour désigner le rapport d'homothétie}

 

" Quand je divise par m la taille de mon étalon, je dois multiplier par n le nombre de fois où je vais devoir le reporter "

Attention ! Le prochain paragraphe contient une formule magique !
Calculons maintenant ln(n)/ln(m) (*), avec une calculette (ou les souvenirs de lycée sur la fonction logarithme).

 

Dans le cas 1, on a ln(5)/ln(5)=1.
Dans le cas 2, on a ln(25)/ln(5)=2. (On trouve toujours 2 si on divise l'étalon par un autre nombre que 5, grâce aux propriétés de la fonction ln : ln(n²)/ln(n)=2)
La formule (*) permet (donc) de calculer la dimension !

 

Ici, la formule a été appliquée sur une droite et un carré, mais -avec des moyens mathématiques un brin plus ardus- on peut l'appliquer à des choses bien plus courbes, comme un cercle, par exemple.

 

Tentons maintenant d'appliquer cette formule magique au flocon de Koch.

Koch_mesur_

Ici, (en dimension ???), quand je divise par 3 la taille de mon étalon, je dois multiplier par 4 le nombre de fois où je vais devoir le reporter.

Ma calculette me dit donc que la dimension de la courbe de Koch est de ln(4)/ln(3)=1.26.
La courbe de Koch est plus qu'une simple courbe, mais pas totalement une surface, donc quelque chose entre les deux ; il n'y a pas de raison pour que sa dimension ne soit pas quelque part entre les 2 !

Dans les cas les plus simples des fractales, la formule ln(n)/ln(m) nous donne la dimension fractale, alias dimension de Hausdorff (pour les cas simples du genre de Koch) !

Histoire de...
Pour finir, quelques exercice pour voir si tout le monde a bien compris, même les deux au fond qui s'amusent à jouer au Pictionnary au lieu d'écouter le cours : calculer les dimensions de Hausdorff des deux fractales suivantes.

La saucisse de Minkowski :

Saucisse

Les premières étapes de la construction de cette fractale sont les suivantes :

Saucisse2

Quand je divise par 4 la taille de mon étalon, je dois multiplier par 8 le nombre de fois où je vais devoir le reporter, la dimension fractale de cette courbe est donc ln(8)/ln(4)=1.5 .

 

Le triangle de Sierpiński :

 

TriangleSierpinski

Quand je divise par 2 la taille de mon étalon (Ici, le côté du triangle équilatéral), je dois multiplier par 3 le nombre de fois où je vais devoir le reporter ; la dimension fractale du triangle est donc de ln(3)/ln(2)=1.58 .

Par contre, je doute qu'un jour sorte un Mario en 2.58D...


Sources :
Les images proviennent en majorité de Wikipédia, une autre a été prise , et les autres sont des créations personelles. (Sauf celles de Mario...)

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Commentaires
I
Bonsoir, <br /> <br /> J'ai beaucoup aimé l'explication concise que vous avez apportée sur une notion assez complexe comme celle-ci.<br /> <br /> Cependant, j'aurais aimé savoir s'il était possible de se procurer une démonstration de la formule (*) ?<br /> <br /> Ou bien, auriez-vous des sources ?<br /> <br /> Merci bien, <br /> <br /> Cordialement.
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L
Merci pour cet article de vulgarisation sur les dimensions fractales ! J'ai enfin compris ce qu'était la dimension de Hausdorff !
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K
Dans la categorie fractale & co : les attracteurs etranges et un logiciel qui lui est specifiquement dedié, chaoscope : http://www.btinternet.com/~ndesprez/index.htm<br /> <br /> C'est amusant, didactique, très gourmand en cpu (et psa multithread :( ).<br /> <br /> Et au milieu de tous ces machins polynomiques a 30 paramètres a retroconvolution pandimensionnelle expensée (sans OGM), on y trouve en guest star l'attracteur etrange de Lorenz. Je suis en train de generer une animation a base de lorenz (ca prend "un peu" de temps a calculer, 300 frames) que je posterai ici : http://www.keru.org/ ;)<br /> <br /> J'ai lu 2 bouquin de benoit mandelbrot.<br /> j'ai oublié le titre exact, mais c'est du genre : "les objets fractals", et "dimension fractale". Dans mon souvenir il ne fait pas le rapprochement avec les "dimensions" que l'on connait, et c'est pas plus mal. Une dimension non-entiere est contre-intuitive et le meilleur moyen de comprendre sans s'arracher les cheuveux et d'oublier qu'il y a un rapport quelconque entre les dimensions spatiale du monde reel et les dimension fractale du monde... fractal.<br /> <br /> En fait, j'aurai été Mandelbrot (et j'en suis malheureusement très loin de l'être) je n'aurai pas utilisé le terme "dimension", mais par exemple "degré fractal". genre : "une fractale de degré 1.26". Ou autre... mais pas dimension.
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E
keru > Tiens, je les connaissais pas, celles là ! Ca n'a pas l'air si compliqué que ça, j'en ferai surement un article !<br /> <br /> Shub > La courbe de Koch, comme les poussières de Cantor, sont la limite d'une suite de courbes de dimension 1 (et leur dimension topologique est 1), c'est pourquoi on les approche avec un étalon de dimension 1. (Simplifications que l'on ne peut faire que dans les cas de fractales à bases de segments).<br /> Dans le cas du triangle de Sierpiński, c'est une limite de surfaces, donc on prend une surface étalon.<br /> On peut d'ailleurs obtenir ce triangle comme une limite de suite de courbes (voir ici : http://www.mathcurve.com/fractals/sierpinski/sierpinskitriangle.shtml ), il faudra alors utiliser un étalon de dimension 1, mais le résultat final est le même.
Répondre
S
En reprenant tes deux exemples :<br /> -la droite est de dimension 1 puisqu'on doit reporter n fois plus souvent un étalon n fois plus petit. Mais cet étalon est pris de dimension 1 (un segment),<br /> -le plan est de dimension 2 puisqu'on doit reporter n² fois plus souvent un étalon n fois plus petit. Mais cet étalon est de dimension 2 (un carreau).<br /> <br /> Alors pourquoi est-ce qu'on utilise un étalon de dimension 1 pour "calculer la dimension" de la courbe de Koch ? Soit il y a là quelque chose de pas très logique (l'étalon dit avoir même dimension que le mesuré), soit j'ai pas tout compris :/ (chose qui s'applique aussi aux poussières de Cantor d'ailleurs).
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