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Choux romanesco, Vache qui rit et intégrales curvilignes
4 octobre 2009

Histoire de ℚ

Pour un bon disciple de Pythagore, tout est nombre : les nombres sont le principe des choses, et donne au monde une harmonie universelle. Sauf évidemment 0 (puisque c'est vide), 1 (puisque c'est l'unité), √2 et autres irrationnels (qui n'existent pas), les nombres négatifs (n'importe quoi...) , les nombres complexes (ils n'y avaient pas pensé) ou tous les autres concepts inventés bien trop récemment. Par contre, si il y a bien un concept mathématique qui était parfaitement compris, c'est celui des nombres rationnels, qui régissent les mécanismes de la nature.

Les rationnels, ce n'est ni plus ni moins que ce que l'on appelle communément les fractions, autrement dit, les nombres que l'on écrit sous la forme "a divisé par b". Cet ensemble a été baptisé ℚ, comme dans "quotient".

On peut tout de même distinguer deux types de rationnels :
- Ceux dont l'écriture décimale est finie, appelé ensemble des décimaux (ID), comme :

expls_decimaux

- Ceux dont l'écriture décimale est infinie (et périodique), qui regroupe également l'ensemble des décimaux (on peut toujours ajouter une infinité de 0). Le surlignage indique les périodicités.

expls_pasdecimaux

Tout nombre rationnel peut ainsi s'écrire de façon périodique (parfois, de plusieurs façon, d'où le paradoxe 10=9.99999....), et, inversement, tout nombre qui admet un développement décimal périodique peut s'écrire sous forme de fraction.

Après la construction de ℕ et la construction de ℤ, nous arrivons donc à parler aujourd'hui de celle de ℚ. Aucun mathématicien n'a laissé son nom à cette construction, personne ne sait vraiment d'où vient l'écriture ℚ (sûrement Bourbaki ?)... Une origine mystérieuse, mais dont la construction n'a plus aucun secrets !

Construction de
A part pour les théoriciens des ordinaux, la construction de ℕ est tout de même complètement anecdotique. La construction de ℤ, quant à elle, revient à la symétrisation de ℕ. Maintenant que c'est fait, à quoi bon s'y replonger ?...
La construction de ℚ, par contre, est essentielle pour n'importe quel algébriste digne de ce nom. On l'appelle plus prosaïquement "localisation de ℤ en ℤ*".

Pour a∈ℤ et b∈ℤ non nul, on définit l'ensemble ℤ×ℤ* comme l'ensemble des couples (a,b). On écrit généralement ce couple sous la forme a/b, mais la barre de fraction n'est que cosmétique. Comme on ne fait pas les choses au hasard, on peut déjà définir une addition et une multiplication sur ℤ×ℤ*, en posant :

lci_Q

Mais pour l'instant, tous les couples sont différents. On a par exemple 3/18 ≠ 1/6, alors que l'on aimerait l'égalité ! Pour avoir quelque chose qui peut ressembler à ℚ, il faut donc définir l'équivalence de deux fractions, ce qui se fait de la façon suivante :

Q_reldequiv

Le passage de ℤ à ℚ a permit d'apporter ce qui manquait aux nombres entiers relatifs : la division ! Avec l'addition, la soustraction, la multiplication et l'ordre, on a tout ce qu'il faut pour faire ce que les algébristes appellent un corps de nombre totalement ordonné.

Q_classesdequiv
Les premiers rationnels, sous leur forme la moins utilisable...

A noter tout de même que, malgré la simplicité de cette construction sur le papier, il aurait fallu vérifier tout ce qui fait que ℚ est ℚ : que l'addition et la multiplication sont bien commutatives, associatives, distributives, qu'elles passent au quotient (et que l'équivalence en est bien une), qu'elles respectent l'ordre, que l'on obtient un ordre, qu'il est bien totalement ordonné...

Localisation
Histoire de résumer les choses, on construit ℚ comme l'ensemble des nombres sous la forme

fractions

en prenant A=ℤ et B=ℤ*, et la définition de l'équivalence donnée un peu plus haut.
Mais le processus peut fonctionner de manière beaucoup plus générale ! Il suffit pour cela de prendre un anneau A (une structure dans lequel on peut faire addition, soustractions et multiplication) et B une partie multiplicative de A (stable par multiplication : si x∈B et y∈B, alors x.y∈B).

Par exemple, prenons A=ℤ et B={1,10,100, ..., 10n, ...} (les puissances de 10). On obtient alors :

decimaux

Que l'on appelle plus simplement les nombres décimaux ! Ceux-là même que l'on peut écrire avec un nombre fini de chiffres après la virgule.

Autre exemple, toujours avec A=ℤ, mais avec B=ℤ\{0,7,14,...,7n,...} (Les entiers qui ne sont pas des multiples de 7).

localise_en_7

L'ensemble que l'on obtient s'appelle le localisé de ℤ en (7) : en endroit où toutes les divisions sont permises, sauf celles par 7 (et par ses multiples). Un nombre comme 1/42 n'y existe pas.
J'admets que, au premier abord, cela n'a pas vraiment d'intérêt... En fait, cette construction permet de rendre inversible tout ce qui n'est pas un multiple de 7. Lorsque l'on étudie une structure d'anneau (comme celle de ℤ), les inversibles s'effacent d'eux même. Une fois passé dans le localisé, seuls les multiples de 7 ressortent, et leur étude n'en est que plus aisée !

Un dernier exemple, en prenant A=ℝ[X] (l'ensemble des polynômes à coefficients réels, qui peuvent s'additionner, se multiplier : c'est un anneau) et B=ℝ[X]* (les mêmes polynômes, mais non nuls).

fractions_rationnels

L'ensemble que l'on obtient n'est autre que l'ensemble des fractions rationnelles, de la forme P(X)/Q(X). Et si maintenant, on prend des polynômes à plusieurs variables que l'on s'amuse à les localiser plus ou moins n'importe où, on peut arriver à tout un tas de théorèmes magiques de géométrie algébrique ! Parmi ceux-ci, le théorème de Bézout, qui prétend entre autres que deux coniques (des cercles, des paraboles, des hyperboles...) se coupent toujours en exactement 4 points...


Sources :
Du bon wikipedia, mais aussi des cours

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Commentaires
Y
Bonjour, j’aime bien ton site , tu pourrais aller voir le mien si ca te tente pour avoir une petite recette ou deux a la prochaine.
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S
Rappel : Théorème : On pose G un geek au réveil. Sous les hypothèses du théorème de Anne-Bananaque, on sait que le polynôme de meilleure approximation de la fonction accélératrice du comptage de G vaut pi. Donc, G atteind son maximum à l'instant t=10000000*e^pi.<br /> <br /> Preuve : (=>) On suppose le théorème vrai. Ca marche. CQFD.<br /> (<=) Comme ça marche dans un sens, ça marche dans l'autre... Trivial.<br /> <br /> Tout cela pour dire que nonn Kid Paddle ne pouvait pas avoir finit de compter...
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E
D'après Chronomaths (http://serge.mehl.free.fr/base/notations.html#not), Peano aurait utilisé Q pour les réels (quantita) et R pour les rationnels (razionale)...
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M
La notation Q pour « quotient » (« quoziente » en italien) a été introduite par le mathématicien italien Giuseppe Peano (1858-1932). Richard Julius Wilhelm Dedekind (1831-1916) utilisait précédemment la notation « R » pour désigner les nombres rationnels.
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