C'était (pas) bien mieux avant
Les 100 plus grandes gaffes, les 100 plus grandes boulettes, les 100 plus grandes chutes de stars... Si Christophe Dechavanne avait été Babylonien, aurait il plutôt appelé son émission "Les 3600 plus grandes cités Babyloniennes" ? S'il avait été Maya, aurait-il fait "Les 400 plus grandes pyramides" ? La réponse est sans doute oui !
Petit historique des systèmes de numération de nos ancêtres.
Les Babyloniens
Nous sommes en 1800 avant Jésus-Christ, les premiers comptables apparaissent. Le problème, c'est qu'avant l'invention des nombres, être comptable n'était pas chose aisée. C'est ainsi que fut inventé le système de numération babylonien, qui est constitué de deux chiffres :
Le clou, qui vaut 1. Pour compter jusqu'à 9, ou met autant de clou que nécessaire.
Le chevron, qui vaut 10. A partir de 10, on remplace les 10 clous par un chevron, puis on continue à ajouter des clous à côté pour compter. On continue de même jusqu'à 59.
(Si les chiffres sont ainsi, c'est parce qu'ils étaient écrits sur des tablettes d'argile avec des roseaux coupés, et c'est pas évident de faire des choses élaborées avec ça)
Jusqu'à 59, la notation est additive en base 10, mais à partir de 60, la notation devient positionnelle, puisque 60 se représente par un simple clou un peu plus loin, qui voudra dire 1 fois 60.
La particularité de la numération Babylonienne est donc de mélanger notation additive (en base 10) et notation positionnelle (en base 60) !
Un petit exemple :
7 + (3×10+3)×60 = 1987
A noter que les unités sont à gauche, et non à droite comme dans notre bon vieux système décimal.
Le gros problème de cette numération réside dans l'absence de zéro, ce qui fait qu'on ne peut pas distinguer le 1 du 60 ou du 3600 (le contexte donne des indice, généralement). On peut aussi facilement confondre 1987 (7+33×60) avec 118807 (7+33×3600), les espaces entrainant une ambigüité.
Celà dit, les babyloniens étaient déjà capable de faire des fractions, ou des "nombres à virgules" de la même façon que nous, en écrivant les nombres comme somme de fractions entières de numérateur 60, 60² etc.
Petit exemple :
30/3600 + 7/60 + 1 = 1,125 (=9/8)
Évidement, sans la virgule, on ne peut pas vraiment distinguer 9/8 de 4050... Il faudra attendre 1500 ans (vers -300) avant qu'un zéro apparaisse dans la numération de position des babyloniens.
A noter que la base 60 reste utilisée par chez nous pour des choses comme l'heure...
Les Mayas
Pendant ce temps là (300 av J-C, 1500 ap J-C), les Mayas comptaient aussi d'une façon hybride positionnelle/additive, mais eux, comptaient avec leur pieds. En effet, ils n'utilisaient pas la base 60 des Babyloniens, mais la base 20 (numération vicésimale, ou vigésimale).
Trois chiffres étaient à leur disposition :
Le point, qui vaut 1. Deux points valent 2, trois valent 3 et quatre valent 4.
Le trait, qui vaut 5. Pour compter jusqu'à 19, on empile autant de traits et de points que nécessaire.
La coquille, qui vaut 0, bien pratique pour la numération de position.
Pour écrire les nombre, on en fait une jolie pile, avec les unités en bas.
Petit exemple :
En haut de la pile : 4 points -> 4 × 20²
Au milieu : 4 points, 4 traits -> 19 × 20
En bas : 2 points, 1 trait -> 7
4×400+19×20+7=1987
Pour faire plus joli, il arrivait aux mayas de représenter les nombre de 0 à 19 par des tête de dieux :
Mais pour compliquer le système, les Mayas, très attaché au temps, on décidé que les dates ne s'écriraient pas de la même façon que les autres nombres. Jusqu'à 359, les choses reste identique, mais au lieu d'écrire 360 de la forme 18×20+0 (Ce qui donne ), il faut changer la valeur du troisième étage par 360 et non 400. Ainsi, si 360 représente une date, il faudra l'écrire . Seul le troisième étage change de valeur, celui du dessus vaudra 20×360=7200, et celui du dessus 144 000.
Cette exception vient du calendrier des mayas, dont l'année (tun) comptait 18 mois de 20 jours. 1 katun faisait 20 tun, un baktun faisait 20 katun...
Petit exemple :
Quatrième étage : 15×7200
Troisième étage : 5×360
Deuxième étage : 12×20
Premier étage : 16×1
Ce qui donne 15×7200+5×360+12×20+16=110 056.
Par contre, pour ce qui est des fractions, les mayas ne connaissaient pas. (Ce qui est étonnant, vu les prodiges qu'ils arrivaient à faire des les calculs de temps)
La base 20, aujourd'hui, se retrouve dans notre façon de prononcer des nombre comme 83 (4×20+3) ou 96 (4×20+16)...
Les Égyptiens
Très calés pour tout ce qui est de l'arithmétique ou de la géométrie, les Égyptiens (Vers les années -2000) souffraient quand même d'une numération loin d'être la plus commode. Basé sur la base 10 (Les Égyptiens avaient bien dix doigts par paires de mains), c'est une numération de type additive. Cette numération dispose de 7 chiffres :
Le bâton, qui vaut 1.
L'anse de panier, qui vaut 10 (Un panier peut contenir 10 objets)
Le rouleau de papyrus, qui vaut 100 (Un papyrus peut contenir 100 hiéroglyphes)
La fleur de lotus, qui vaut 1000 (Les fleurs de lotus se trouvent par milliers)
Le doigt pointé vers le ciel, qui vaut 10 000 (On voit 10000 étoiles dans le ciel)
Le tétard, qui vaut 100 000 (On les trouve par centaines de milliers après la ponte)
Un Dieu agenouillé supportant le ciel, qui vaut 1 000 000 (Un millions d'années, c'est l'éternité, et les Dieux sont éternels)
Pour écrire un nombre, il suffit de mettre autant de signes que nécessaire. Ainsi, un nombre comme 1987 s'écrira :
Quand on sait dessiner, c'est très appréciable, mais ça fait quand même beaucoup de signes (99999 demande 5 chiffre dans notre notation décimale, mais 45 pour les égyptiens. (31 en Babylonien, 23 en maya)). Le bon côté, c'est qu'on peut écrire les chiffres comme on veut, le sens d'écriture n'intervient pas. On ne peut également pas donner de nombres plus grands que 10 000 000, mais pour les Égyptiens, ces nombre sont plus grands que l'infini, et n'ont donc aucun sens.
Le zéro était également inconnu pour les Égyptiens, mais pas les fractions (mais je reparlerai des fractions égyptiennes un autre jour)
Les Grecs / Les Romains
Retour en Europe, avec les Grecs (-400) puis les Romains (-300) , qui utilisent un système hybride pour faire les calculs, mais s'appuyant sur la base 10. Ni totalement positionnel, ni totalement additive, ces systèmes de numération étaient loin d'être pratique pour faire de l'arithmétique.
Les chiffres Grecs sont Ι (1), Γ (5), Δ (10), (50), H (100), X (1000) et M (10000). (Numération "acrophonique")
Les chiffres Romains sont I (1), V (5), X (10), L (50), C (100), D (500) et M (1000).
La numération grecque est la plus simple : I, II, III, IIII, Γ, ΓI, ΓII, ΓIII, ΓIIII, Δ, ΔI etc.
En Romain, on compte plutôt ainsi I, II, III, IV, V, VI, VII, VIII, IX, X, XI etc.
Mis à part la notation des 4 et des 9, les deux écritures sont les même. Le zéro est toujours inconnu.
Cette notation grecque acrophonique, utilisée dans le commerce, sera cependant détrôné par le système alphabétique.
Les unités de 1 à 9 s'écrivent ainsi :α, β, γ, δ, ε, ϛ, ζ, η, θ
Les dizaines de 10 à 90 s'écrivent plutôt comme ça : ι, κ, λ, μ, ν, ξ, ο, π, ϟ
Les centaines de 100 à 900 sont représentées ainsi : ρ, σ, τ, υ, φ, χ, ψ, ω, ϡ
Pour les milliers, on reprend les unités en y ajoutant une aristerí keréa (une virgule, en fait) : ͵α, ͵β, ͵γ, etc.
Pour écrire un nombre, il y a juste à prendre ce qui nous intéresse dans la liste au dessus. 205 s'écrira σεʹ (On ajoute une petite corne -keréa- à la fin des nombres), 6040 s'écrira ͵ϛμʹ.
Le bon côté, c'est qu'il n'y a pas besoin de zéro. Le côté négatif, c'est que ça fait quand même 27 chiffres...
Les Chinois / Les Indiens
Retour dans le temps, vers -1300, et du côté de l'Asie. Des anciennes numérations, c'est la chinoise la plus proche de notre système décimal actuel. 9 chiffres sont disponibles (de 1 à 9), le système est positionnel. Le seul hic est l'absence du zéro qui est remplacé par un espace. Pour éviter les ambigüités, les chiffres des rangs pairs ne s'écrivent pas de la même façon que ceux des rangs impairs (Ce qui donne en fait 18 chiffres).
Un nombre comme 1987 s'écrira alors :
C'est enfin au 4ième siècle que les Indiens inventent le zéro, et possèdent alors un système positionnel en base 10... Le système décimal ! (Bien que les chiffres ne sont pas les mêmes...)
Et comme un bon article ne peut se terminer sans un javascript, voilà de quoi transformer un nombre décimal en sa notation Babylonienne ou Maya :
Sources :
Du Wikipédia
Un peu de mon vieux cours d'Histoire des sciences