Une histoire de partie imaginaire
La spirale d'Ulam ou la spirale de Sacks, en plus d'un certain sens esthétique, donne quelques informations sur la distribution des nombres premiers. L'étude de ces nombres est importante pour élargir l'ensemble des connaissance mathématiques, mais importante aussi dans la sécurité bancaire.
L'hypothèse de Riemann est aussi un problème en relation avec la distribution des nombres premiers, donc avec la cryptographie, les transactions bancaires, les grandes entreprises et la bombe atomique.
Ce problème (insurmontable ?) récompensera d'un millions de dollars (par la Clay Mathematical Institute) quiconque parviendra à le démontrer !
Aujourd'hui, nous n'allons pas résoudre le problème, mais on va quand même essayer de le comprendre ! (le minimum requis est de connaitre les nombres complexes)
L'énoncé à démontrer est le suivant : "Les zéros non triviaux de la fonction zêta de Riemann ont tous pour partie réelle 1/2".
Il est vrai que dit comme ça, ça ne nous avance pas vraiment, tâchons d'y voir plus clair.
La fonction zêta de Riemann
La fonction zêta de Riemann (ou d'Euler) est une série (une somme infinie) qui ressemble à ça :
Pour s réel, cette série n'a de véritable sens que lorsque s>1.
Par exemple, on a :
(On retrouve la série harmonique pour s>1)
(Cette formule est la solution du problème de Bâle, loin d'être évident à montrer)
En fait, cette série a un sens pour s réel plus grand que 1, mais également lorsque s est un nombre complexe (de partie réelle >1). Il faut d'abord passer par la définition de la puissance d'un nombre complexe, mais c'est faisable !
Par une opération qui n'a pas lieu d'être expliqué sur ce blog (un prolongement analytique), on arrive à étendre la définition de notre fonction à tous les nombres complexes (sauf au point 1, où la fonction vaut toujours ∞).
Représenter cette fonction sous forme de graphique n'est pas évident, puisqu'il s'agit d'une fonction complexe (deux dimensions) à valeurs complexes (2 dimensions) ; il nous faudrait 4 dimensions pour le représenter au mieux. On peut cependant représenter le module de ζ(s) en fonction de x+iy :
Plus c'est bleu, on on est proche de zéro... Où sont les zones bleues ?
Cette représentation permet de mettre en évidence le point 1, où la fonction tend vers l'infini (un pôle), ainsi que les points -2, -4, ½+i.14,13i et ½-i.14,13, où la fonction semble être égale à 0.
-2 et -4 sont des zéros triviaux : on montre que si s est un entier pair négatif, alors ζ(s)=0
et sont des zéros non triviaux. C'est de ces zéros que parle l'hypothèse de Riemann.
L'hypothèse de Riemann
La fonction zêta de Riemann est ce que l'on appelle une fonction "méromorphe", c'est à dire, une fonction à valeur complexe que l'on peut rapprocher d'une fonction rationnelle (un polynôme divisé par un autre). Pour de telles fonctions, connaitre les pôles (les points où la fonction tend vers l'infini) et ses zéros permet de connaitre entièrement la fonction (De la même façon que les racines d'un polynôme permet de le connaitre). Ceci explique pourquoi un tel intérêt pour les zéros de la fonction.
On connait bien une partie de ces zéros, les entiers pairs négatifs, appelés zéros triviaux :
ζ(-2) = ζ(-42) = ... = ζ(-2n) = 0 (n entier)
La fonction semble cependant s'annuler en d'autres points, et on suppose que ces points ont une partie réelle à ½. La question de l'hypothèse est là : montrer que tous les points où s'annule la fonction zêta ont une partie réelle égale à ½.
C'est à dire, si ζ(x+iy)=0, alors x=1/2 (ou x=-2n et y=0)
Ce que l'on sait, pour l'instant, c'est qu'il y a une infinité de zéros non triviaux, et que leur partie réelle est entre 0 et 1. On sait quand même que au moins un tiers des zéros non triviaux ont bien la partie réelle égale à 1/2.
Expérimentalement, il a été vérifié que l'hypothèse est vraie (aux erreurs de calcul près, un ordinateur ne peut représenter les nombres réels de manière exacte) pour les 1 500 000 000 premiers zéros non triviaux. Mais ça ne le justifie pas pour tous !
Bien que cette hypothèse ne soit toujours pas démontrée, beaucoup de théorème en sont une conséquence. En déduire un théorème que l'on sait faux serait une bonne façon d'infirmer l'hypothèse de Riemann, mais en attendant, tous ces théorèmes ne sont pas à 100% valides. (ce qui à un côté "dangereux", quand un théorème s'appuie sur un autre qui s'appuie sur un autre qui s'appuie sur l'hypothèse de Riemann...)
Et les nombres premiers, dans tout ça ?
J'y arrive ! C'est vrai que jusqu'à ici, on a vu apparaitre aucun nombre premiers, mais c'est Leonhard Euler qui découvre le rapport, grâce à l'égalité suivante :
Cette égalité permet de donner de bonnes indications sur la répartitions des nombres premiers ; ce n'est qu'une des conséquence de l'hypothèse de Riemann, parmi de nombreuses autres.
La fonction zêta est aussi la source d'un grand nombre d'autres problèmes. C'est bien d'avoir les zéros, mais combien valent t-ils ? Y a t'il des valeurs imaginaires rationnelles ? Et tout une ribambelle de questions sans réponses aujourd'hui !
Sources :
Wikipédia - d'où provient l'illustration (Et de nombreux endroits ailleurs)