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Choux romanesco, Vache qui rit et intégrales curvilignes
26 mai 2013

En mai, fais ce qu'il te plaît

Pendant que la France se plaint du temps qu'il fait, il y a des mathématiciens qui bossent. Et en ce mois de mai, ils ont été particulièrement efficaces, puisque deux théorèmes majeurs de la théorie des nombres viennent d'être percés à jour : la conjecture de Goldbach et la conjecture des nombres premiers jumeaux. Oui, les deux. Le même mois ! En réalité, ce ne sont que des formes faibles de ces théorèmes qui ont ici aujourd'hui été démontrées, mais il y a quand même de quoi se réjouir.

D'un côté, on a donc la conjecture faible de Goldbach, prouvée par Harald Helfgott, mathématicien péruvien au CNRS ; son papier est en cours de relecture, mais les premiers échos sont encourageants. De l'autre, on a la conjecture des nombres premiers jumeaux, dont une forme faible vient d'être prouvée par Zhang Yitang, chercheur chinois à l'université du New Hampshire ; son papier a été publié le 21 mai dernier dans l'Annals of Mathematics.

gna_gna
Les nombres premiers - Les nombres premiers jumeaux
Les nombres premiers cousins - Les nombres premiers sexy
Toutes ces séquences sont-elles infinies ?...

Les nombres premiers
Faut-il encore rappeller ce qu'est un nombre premier ?... Bon :

Un nombre premier est un nombre possédant exactement deux diviseurs : 1 et lui-même.

De la même façon que les atomes sont les briques élémentaires de la matière, les nombres premiers sont les briques élémentaires de tous les nombres. C'est en ça que les nombres premiers SONT intéressants !
Ces nombres, ont les connaît depuis l'antiquité ; le fait qu'il en existe une infinité fait partie des acquis de l'humanité depuis maintenant un bon paquets de siècles. Mais ce qui intéresse l'humanité aujourd'hui, c'est surtout la façon dont ils se répartissent. Y en a-t-il beaucoup ? Beaucoup beaucoup ou beaucoup pas beaucoup ? La majorité des théorèmes et conjectures sur les nombres premiers ne sont finalement qu'une variation de cette question : 

  • Théorème d'Euclide sur les nombres premiers (Euclide, 300 av JC) : il existe une infinité de nombres premiers.
  • Théorème fondamental de l'arithmétique (Euclide, 300 av JC ; Gauss, 1798) : tout nombre entier peut s'écrire de façon unique comme produit de nombres poremiers (à l'ordre près)
  • Théorème des nombres premiers (Hadamard & De la Vallée Poussin, 1896) : il y a environ x/ln(x) nombres premiers inférieurs à x.
  • Postulat de Bertrand (Tchebychef, 1850) : il existe toujours en nombre premier entre un nombre et son double
  • Théorème de Green-Tao (Green & Tao, 2004) : il existe des suites arithmétiques (comme 5, 11, 17, 23, 29) de nombres premiers arbitrairement longues.

Ça, c'est pour les problèmes résolus. La liste des problèmes non résolus est par contre beaucoup plus longue, et la plupart paraissent aujourd'hui inaccessibles. Hypothèse de Riemann, conjecture de Goldbach, conjecture des nombres premiers jumeaux, conjecture de Polignac, conjecture des nombres premiers de Mersenne, conjecture des nombres premiers de Fermat, conjecture de Legendre... Cette liste est loin d'être exhaustive !

La conjecture de Goldbach
On sait que n'importe quel nombre peut s'écrire comme produit de nombres premiers (c'est le théorème fondamental de l'arithmétique). Mais est-ce aussi le cas pour les sommes ? La conjecture ose poser la question :

Conjecture forte de Goldbach :
Tout entier pair (supérieur à 2) peut-il être écrit comme la somme de 2 nombres premiers ?

Formulée en 1742 par Christian Goldbach, la question a longuement été étudiée depuis (cf l'article de l'année dernière sur le sujet).

Oui, la conjecture a été vérifiée pour tous les nombres pairs plus petits que 4×1018.. Oui, la conjecture a l'air évidente (il existe tellement de façons d'écrire un nombre pair comme somme de deux nombre impairs qu'il serait vaiment pas de bol  qu'aucune de ces décompositions ne soit deux nombres premiers). Mais malheureusement, elle n'en demeure pas moins indémontrée et, semble-t-il, indémontrable. Le dernier progrès en date est une démonstration d'une forme faible du théorème, par Terrence Tao (médaillé Fields) en 2012 :

Conjecture faible de Goldbach (Théorème de Tao) :
Tout entier impair est somme de (au plus) 5 nombres premiers

Avec une telle avancée vers la conjecture forte de Goldbach, on pensait être tranquille encore quelques années. Mais c'était sans compter sur Harald Helfgott qui vient de publier une démonstration de :

Conjecture faible forte de Goldbach (futur ? théorème de Helfgott) :
Tout entier impair est somme de 3 nombres premiers

En fait, le théorème (?) de Helfgott avait auparavant déjà été démontré, mais seulement dans le cas des nombres prodigieusement grand (ceux ayant plus de 1346 chiffres). La forme forte du théorème de Goldbach reste cependant toujours hors de portée, les outils utilisés dans la démo de Helfgott sont inutilisables dans le cas pair.

La conjecture des nombres premiers jumeaux
Deux nombres premiers sont "jumeaux" lorsqu'ils sont séparés de 2. Par exemple, (3,5), (5,7), (11,13) ou (17,19) sont des couples de nombres premiers jumeaux. Combien en existe-t-il ? C'est la question :

Conjecture des nombres premiers jumeaux: 
Existe-t-il une infinité de nombres premiers jumeaux ?

Expérimentalement, on constate qu'il y en a quand même un bon paquet, même si ils ont tendance à se raréfier - constatation n'est pas démonstration. Quand on sépare deux nombres premiers de 4, on obtient des nombres premiers cousins, comme (3, 7), (7, 11), (13, 17) ou (19, 23). Quand les sépare de 6, on obtient des nombres premiers "sexy" (ne vous excitez pas, ça vient du latin sex qui signifie 6), comme (5,11), (7,13), (11,17) ou (13,19). On obtient donc d'autres conjectures :

Conjecture des nombres premiers cousins (/sexy) : 
Existe-t-il une infinité de nombres premiers cousins (/sexy)?

Ces questions se généralisent pour n'importe quel écart pair. Ce que Zhang Yitang a démontré, c'est donc que l'une de ces conjectures est vraie, mais on ne sait pas encore laquelle. Enfin, si : on sait que l'écart en question est un nombre inférieur à 70 000 000 (l'histoire ne dit pas comment on appelle deux nombres premiers séparés de 70000000)

Théorème de Zhang :
Il existe une infinité de couples de nombres premiers de la forme (p, p+2n), où 2n est un nombre inférieur à 7×107.

On attend donc maintenant avec impatience la fin du mois. Peut-être un annonce de la résolution d'une forme faible de l'hypothèse de Riemann ?...


Sources :
Major arcs for Goldbach's theorem, l'article de Helfgott
Bounded gaps between primes, l'article de Zhang

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Commentaires
A
Est-ce qu'il y a moyen de comprendre simplement pourquoi la difference est de 70000000 ? Pourquoi pas 6000000 ?<br /> <br /> Ou est-ce une approximation d'un nombre genre 2*pi* e^(pi*pi/6) ?
Répondre
N
J'adore l'ensemble des nmobres premiers sexy!
Répondre
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